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6 janvier 2023

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[Regards sur Noël] Aller simple ou aller-retour ? la fuite en Égypte

Pourquoi, lorsque la publicité nous présente des voitures, certaines vont plutôt vers la gauche, lorsque d’autres sont orientées vers la droite ?

Il est connu qu’en langage visuel aller vers la gauche c’est choisir la sécurité, alors qu’aller vers la droite veut signifier le dynamisme. Ici, dans ce vitrail de la Cathédrale Saint Pierre de Troyes, chapelle 0 du déambulatoire « vitrail de l’enfance du Christ et de la Dormition de la Vierge », pourquoi la scène de la fuite en Egypte nous montre-t-elle Marie, Joseph, l’enfant et l’âne se dirigeant vers la droite ? Très souvent cette même scène, en vitrail, en peinture, en sculpture, nous est présentée allant vers la gauche, comme pour nous dire que les protagonistes choisissent la sécurité de l’Egypte. Ici, veut-on nous dire que « ceux qui en voulaient à la vie de l’enfant sont morts » (Mt 2/20) et que, sur l’ordre de l’ange, le couple et l’enfant ont repris la route pour dépasser la Judée et se rendre dans la région de Galilée ?

Déjà, il y a une raison pratique à cette présentation. L’artiste a voulu sur les 2 quarts de rond, au dessous de cette scène,  représenter le massacre des Innocents. Sous la fuite en Egypte, côté gauche, Hérode ordonne le massacre des Innocents

et en regard, sur la même ligne, côté droit, 2 soldats munis d’épées, empoignent des enfants arrachés à leurs mères.

C’est pour fuir ce massacre que l’ange avait ordonné le départ en Egypte (Mt 2/13). Hérode étant mort, le retour peut avoir lieu ; ce qu’évoque ce quart de rond, à gauche. La scène suivante, sur la même ligne, à droite, évoque la présentation de Jésus au Temple : « mes yeux ont vu ton salut » dira Syméon (Luc 2/29).

Logiquement la fuite en Egypte devrait précédée le massacre des Innocents puisque c’est grâce à elle que l’enfant a été mis en sécurité. Mais l’artiste avait besoin de ces 2 quarts de rond pour évoquer le massacre : l’ordre et l’exécution.

Voici Joseph

vitrail de la Cathédrale Saint Pierre de Troyes, chapelle 0 du déambulatoire

C’est lui que l’ange, selon Saint Matthieu, avait prévenu de fuir : « lève-toi, prends avec toi l’enfant et sa mère et fuis en Egypte » (Mt 2/13) Il est en tête, il est le chef de famille. Prendre des initiatives lui revient. Marie compte sur lui : leurs regards se croisent

vitrail de la Cathédrale Saint Pierre de Troyes, chapelle 0 du déambulatoire

Elle se laisse conduire, soucieuse d’abord de l’enfant qu’elle tient dans ses bras. Joseph les emmène dans la bonne direction, – le retour ? – celle du salut, « d’Egypte, j’ai appelé mon fils » même s’il lui faudra d’abord éviter la Judée. Joseph est comme le pèlerin du Moyen Age : il a son bâton de marche  qui lui permet toutefois de porter le baluchon de la famille sur l’épaule. L’enfant est passif dans les bras de sa mère.

Il est langé, mais ce qui l’habille nous invite à envisager le linceul à venir, lors de sa mort. Les bandelettes sont bien visibles. Il vient d’échapper à la mort ; le massacre des Innocents est en arrière, c’est la scène juste en dessous. La mort est en avant, ce sera Jérusalem, que, dans un premier temps, lors de son retour, il va éviter : et la mort, et Jérusalem. Pour l’instant, il est confié aux soins de Marie qui l’enserre, et de Joseph qui s’applique à bien les conduire, tout en tenant fermement, de la main droite, la rêne de l’âne. Car ce dernier trotte, conscient de son importance.

Il porte celui que les Mages viennent de reconnaitre pour le roi d’Israël. Sera-ce la même bête qui de nouveau portera le « Fils de David » : « voici ton roi … monté sur une ânesse et sur un ânon, le petit d’une bête de somme » ? (Mt 21/5). Ce sera lors de l’entrée de Jésus à Jérusalem : les Rameaux.

L’âne n’est pas dans l’évangile de Matthieu, seulement dans les récits apocryphes (Protévangile de Jacques, écrit au IIème siècle). Il y est mentionné comme portant Marie, enceinte et Joseph conduisant l’attelage, en marche vers Bethléem pour se faire recenser : « Joseph sella son âne et jucha Marie dessus ».

Cet âne en évoque un autre présent dans l’Ancien Testament. C’est lui qui permettra à Moïse, autorisé par un ange, de revenir … en Egypte lorsqu’il ne risquera plus d’être mis à mort par Pharaon : « Moïse prit donc sa femme et son fils, les installa sur l’âne, et retourna au pays d’Egypte » (Exode 4/20). L’Egypte c’est le lieu de l’esclavage pour Israël. Jésus vient pour délivrer l’humanité de l’esclavage du péché et la sauver de la mort, comme lui-même passera par la mort, à Jérusalem, du fait des autorités religieuses et romaines, mais le 3ème jour il ressuscitera d’entre les morts. Espérance ? Bien sûr ! Autour d’eux trois il est une végétation

vitrail de la Cathédrale Saint Pierre de Troyes, chapelle 0 du déambulatoire

qui évoque une oasis et introduit un peu de fraicheur, à moins qu’il ne nous soit dit que le désert, lieu de passage, est en train de refleurir (Isaïe 32/15, 41/19). Des bourgeons qui ne demandent qu’à éclore !

Alors aller ou aller-retour ? Retour bien sûr, en évitant Jérusalem, jusqu’à Nazareth en Galilée, pour que Jésus puisse être appelé par le nom que les prophètes avaient annoncé de lui : « il sera appelé Nazoréen » (Mt 2/23).

texte : Père Henri Imbert pour le diocèse de Meaux

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Édito de Mgr Jean-Yves Nahmias: Les saints, des témoins de la foi
29 octobre

Édito de Mgr Jean-Yves Nahmias: Les saints, des témoins de la foi

Chers amis,

Nous sommes tous appelés à la sainteté par notre baptême.
La sainteté n’est pas réservée à une élite : elle est un chemin à emprunter chaque jour, une fidélité humble et persévérante qui renouvelle notre choix de suivre le Christ dans les gestes ordinaires de nos vies.

En célébrant la Toussaint, nous rendons grâce pour cette multitude de saints connus et inconnus qui ont, chacun à leur manière, reflété la lumière de Dieu dans le monde. Nous tournons aussi notre regard vers les témoins d’aujourd’hui — ces hommes et ces femmes de nos familles, de nos paroisses, de nos mouvements — qui, par leur vie donnée, continuent de manifester l’amour et la charité du Christ au service de tous.

Notre diocèse a lui aussi vu fleurir de tels témoins. Le Père Maurice Rondeau, prêtre du diocèse, éducateur passionné, semeur d’enthousiasme auprès des jeunes, prêtre fervent et entièrement donné à sa mission, en est un exemple lumineux. Reconnu « martyr de l’apostolat », il sera béatifié le samedi 13 décembre prochain à la cathédrale Notre-Dame de Paris, aux côtés de 49 autres jeunes Français morts en héros de la foi pour leur engagement missionnaire dans les camps et les usines d’Allemagne entre 1944 et 1945.

Deux autres laïcs du diocèse seront également béatifiés : René Rouzé jociste, né à Bombon, et René Boitier scout, originaire de Faremoutiers.

En cette fête de la Toussaint, confions au Seigneur ces témoins de la foi et demandons-lui de susciter en notre temps d’autres cœurs brûlants de charité, disponibles pour l’Évangile.
Que la joie de tous les saints éclaire nos vies et renouvelle notre désir de marcher chaque jour à la suite du Christ.

Fraternellement,

+ Jean-Yves Nahmias,
Évêque de Meaux

Crédit photo : Diocèse de Meaux Service communication